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Histoire du village

MORILLON est un village de Haute-Savoie, en Faucigny, de la haute vallée du Giffre partagé entre tradition et modernité.
Ses nombreuses maisons traditionnelles, son église Saint-Christophe du XVe siècle, ses trois chapelles : les Miaux du XVIe siècle, le Chatelard du XVIIe, et le Verney du XIXe lui donnent un caractère authentique. En parallèle, sa situation privilégiée et ses infrastructures touristiques en font une station touristique été/hiver renommée : Morillon fait partie du Grand-Massif, et bénéficie des liaisons avec Samoëns, les Carroz, Flaine et Sixt, ce qui totalise 265km de pistes de ski alpin.

Depuis quand le village de Morillon existe-t-il ? Question difficile à répondre !
La première trace écrite parvenue jusqu’à nous, est un acte notarié du 7 septembre 1276, mentionnant Vésigny (lieu-dit actuel) près de Certous entre Girard de Copeis, sa femme Jordanne et Béatrix la Grande Dauphine, Dame de Faucigny .

Béatrix réside à quelques kilomètres, au château de Châtillon ou à Mélan. Elle fera construire La Chartreuse de Mélan à Taninges à partir de 1288, pour abriter la sépulture de son fils Jean décédé à 18 ans d’une chute de cheval à Bonne, puis la sienne. Elle est appréciée de ses sujets.

Notre village fait partie du Faucigny gouverné par les Sires puis Barons de Faucigny pendant plus de trois siècles, jusqu’en 1349, baronnie fédérée au Saint Empire Romain Germanique tout comme le Comté de Savoie auquel elle est cédée en 1355, et partage son histoire depuis. Sur d’autres documents sont cités Honora, les Miaux, Verney. Le nom de Morillon apparaît plus tard.

L’an 1369, un éboulement venu de la Sciard engloutit une partie d’Honora, forme un promontoire nommé le Crêt de Morellons, qui donne au fil du temps Morillon.
Dès cette époque on a trace d’industries : moulins, battoirs, scieries, tanneries…

Morillon dépend de la Châtellenie de Samoëns, administrée du XVIe à la fin du XVIIIe siècle par la famille Jaÿ- De Gex, anoblie puis élevée au titre de Baron de Saint Christophe en 1622.

Sur le Crêt de Morellons, on bâtit l’église Saint-Christophe, fondée en 1457, et plus tard, le centre du village actuel. Le plus vieux bâtiment subsistant actuellement semble être la maison forte des Miaux, qui comporte une poutre sculptée et datée de 1288.

On pratique l’agro-pastoralisme de montagne, avec « remues » (déménagements temporaires en milieu de coteau) et exploitation des alpages des Saix, Gers-Les Foges, La Vieille, albergés (bail emphytéotique) par les Barons de Faucigny et Comtes ou Ducs de Savoie.

Vivant dans un climat rude, pour compléter les cultures vivrières parfois insuffisantes, les Morillonnais comme bon nombre d’habitants de la vallée, se spécialisent dans les métiers du bâtiment et travaux publics. En 1731, ils sont 110 maçons et tailleurs de pierre dont 14 d’entre eux classés « maître » sont entrepreneurs et parfois architectes. A ceux-ci s’ajoutent les charpentiers, menuisiers, verriers, zingueurs. Ils émigrent temporairement de Pâques à Noël sur des chantiers lointains. Leur compétence est reconnue : en Savoie, Valais, ils construisent églises, bâtiments administratifs, ponts…
Vauban, Voltaire, Napoléon Bonaparte entre autres, leur confient fortifications terrestres et portuaires, châteaux, canaux, ponts, etc. Ils iront partout en Europe exercer leur art.

Afin de mieux s’organiser, ils créent avec tous ceux de la haute vallée, la Confrérie des Quatre Couronnés en 1659, à Samoëns, puis s’en séparent et fondent celle de Morillon en 1835. Lorsque tous les émigrants sont rentrés au pays, vers Noël, l’un d’entre eux offre un pain bénit de 15 kg à tous les paroissiens présents au cours d’une messe en l’église Saint-Christophe. C’est un fort symbole de piété, de partage et transmission par le « crochon » que reçoit le compagnon qui l’offrira l’année suivante, tradition qui demeure de nos jours. Ces travaux apportent prospérité au village, et la construction des nombreuses maisons traditionnelles qui allient harmonieusement la pierre et le bois, matériaux abondants dans la vallée.

Soucieux d’instruire leurs enfants, les Morillonnais fondent une école dès 1741 , puis une autre en 1842 ! Les fondateurs sont déjà lettrés pour la plupart !
Certains Morillonnais occupent des postes importants dès le XVe siècle : notaire ducal à Samoëns, d’autres au XVIIIe siècle au Sénat de Savoie, ou émigrent définitivement et s’élèvent socialement.

L’arrivée des révolutionnaires français en 1792 freine ce dynamisme. De 1792 à 1815 nous devenons français, et subissons l’interdiction d’émigrer. Le clergé insoumis est pourchassé parfois hébergé, caché par les habitants. La flèche du clocher est abattue sur l’ordre d’un délégué de la Convention Albitte car « elle offense l’œil républicain » ! Elle sera remplacée par un clocheton. La cloche est récupérée pour en faire des canons, et les cordes pour la marine à voile !
La monarchie Sarde est restaurée en 1815, et en 1860, la Savoie est rattachée à la France.

Au XIXe siècle s’ajoute l’émigration des Morillonnais vers les grandes villes Paris, Lyon, Genève.
La guerre de 1914-18 met fin à l’émigration des bâtisseurs, et modifie peu à peu la vie du village. A l’agro-pastoralisme et aux métiers du bâtiment viennent s’ajouter les métiers de l’horlogerie et du décolletage dans la vallée de l’Arve, puis les activités liées au tourisme naissant.

Un projet de station de sports d’hiver est élaboré en 1939, interrompu par la guerre de 1939-45. Un télé-traineau est mis en place en 1950, auquel succède le premier télésiège reliant Morillon aux Esserts en 1958. Puis la station se développe pour atteindre actuellement 12000 lits. Elle se relie avec les voisines : Les Carroz, Samoëns, Flaine, Sixt : Le GRAND MASSIF est né, avec 265km de pistes.

Le Lac Bleu, mis en chantier en 1990 et situé au bord du Giffre, est devenu un lieu de baignade, de promenade et d’activités de plein air prisé des locaux et des touristes du printemps à l’automne.

MORILLON GRAND MASSIF est devenu une station touristique de référence, l’hiver comme l’été, poursuivant son développement, soucieuse de préserver une belle qualité de vie à ses habitants et tous ceux qui choisissent de venir y séjourner.

Texte rédigé par Marie-Claude PERRET-MICHAUD, Guide du Patrimoine et Guy DEAGE
Pour de plus amples renseignements sur la vie du village, vous pouvez suivre les visites guidées organisées par un guide du patrimoine des Pays de Savoie. (Renseignements à l’office de tourisme)

1 Maniguet « Histoire de Morillon » Tavernier « Histoire de Samoëns »
2 IRMA plan PPR – Cahiers Dechavassine ADHS
3 Tavernier « Histoire de Samoëns »
4 « Notte des maîtres tailleurs de pierre et massons de Morillon » de 1731, archives de la mairie de Samoëns
5 Archives paroissiales de Morillon non classées

Création de la station de ski et développement touristique

Rodolphe Töpffer, pédagogue, essayiste, dessinateur et créateur de la bande dessinée au début de XIXème siècle, décrit ainsi son voyage dans notre vallée du Giffre :  » La route continue à remonter le cours du Giffre au travers d’une vallée très pittoresque et ombragée par de jolis bois de vernes. De tous les côtés jaillissent des cascades qui perdant leur fureur en arrivant à la plaine, vont porter au Giffre le tribut de leurs eaux au travers de gazons fleuris » (1).
Le village de Morillon situé au cœur de cette vallée du Giffre, ne pouvait que montrer sa volonté de devenir un village touristique. En 1905 déjà, il adhérait au syndicat d’initiatives cantonal sous la présidence du septimontain Nicodex avec les délégués morillonnais Luc Dérolland et Charles Anthoine.
Morillon aujourd’hui, s’inscrit dans l’ensemble appelé « ARVE-GIFFRE » jusqu’en 1980, qui est devenu en 1981 « Le GRAND MASSIF « avec les stations de Flaine, Les Carroz, Morillon, Samoëns et Sixt.

Tout est parti de l’achat à la Plaigne en 1934 d’un ancien chalet d’alpage par Pierre Cailler, un banquier d’affaire genevois qui devint ensuite un éditeur d’art renommé. Amoureux de cette région, il achète entre 1937 et 1939 des terrains d’alpage à Morillon, au lieu-dit Les Esserts , en vue de créer une station de sports d’hiver. Déjà à l’époque, de nombreux amateurs de glisse montent en peaux de phoque à la Croix des Sept Frères pour redescendre à ski sur les pâturages enneigés. Tout était dit : la société instigatrice se nommera la Société de la Croix des Sept Frères. Mais en 1939, la seconde guerre mondiale retarde ce projet.

Un prototype de remontée mécanique voit le jour vers 1950 à l’initiative de Luc Desrolland et son gendre Victor Dénarié au lieu-dit Les Bossons, vite abandonné suite à une exploitation difficile (2). A cette époque l’accueil touristique s’organise autour quelques pensions de famille, Le Visigny , Le Badney Le Beauséjour, Claire Fontaine et le Bon accueil. Les premiers pas de Morillon station de sports d’hiver débutent en 1954 avec la volonté du Maire Louis Lefort de relancer le projet de la Société de la Croix des Sept Frères. Pierre Cailler avec de nouveaux associés, son gendre Ivan Bettex, André Gaffinel et sa belle-sœur Clotilde Quentin de Coupigny, entreprennent la transformation de deux chalets d’alpage en Hôtel des Esserts. Le Maire Louis Lefort, très sensible au tourisme social fait acheter par la commune de Choisy-le-Roi le Chalet Béchar pour y créer une colonie de vacances.

Le premier télésiège est construit en 1958 entre le village et Les Esserts. Un téléski pour débutants est installé sur le plateau à 1100 mètres, puis en 1959 un grand téléski emmène les skieurs dans les alpages de La Vieille, au pied de la Croix des Sept Frères. Morillon devient une station touristique d’hiver, avec aux Esserts des chalets de location, l’hôtel des Esserts, l’hôtel de la Combe, un magasin de sport, un self-service. C’est alors que le Club Européen du Tourisme (CET) commercialise le site et amène une importante clientèle. En parallèle, se développent au village des hôtels-restaurants : Le Morillon, Le Sauvageon, le Chalet Fleuri avec l’UCPA à l’Eteley. Deux téléskis sont installés au Clos Gex, mais aujourd’hui disparus. Tout cela permet à la première Ecole de ski français d’ouvrir avec 6 moniteurs sous la direction de René Pomet .

L’activité touristique se poursuit avec la première route communale qui arrive à la station en 1970 ainsi que la liaison avec un forfait commun Morillon-les Carroz en 1978.
Afin de pérenniser l’exploitation du domaine skiable, la société de La Croix des Sept Frères commande à l’Architecte-Urbaniste Pierre Merminod une étude globale de développement. C’est le SEATM ( Service d’Étude et d’Aménagement Touristique de la Montagne ) qui soutient ce dossier le 2 juin 1977 à Valberg devant la commission interministérielle, en présence du Maire François Delacoste et de son conseiller François Jourdan, d’ Ivan Bettex et Henry Gaffinel pour la société privée.
Le verdict est que rien de ne peut aboutir tant que la commune ne se dote pas d’un Plan d’Occupation des Sols (POS) et d’un Plan Pluriannuel de Développement Touristique (PPDT). Ce nouveau dossier doit être présenté ensuite au comité des Unités Touristiques Nouvelles (UTN) fraîchement créé. Un vrai parcours du combattant !

Tout cela pris beaucoup de temps et nous conduit à l’année 1981, les quatre stations sont alors reliées avec un forfait commun, le Grand Massif est né. La même année, la commune rachète les remontées mécaniques à la société de La Croix des Sept Frères. Elle décide d’en confier l’exploitation par un contrat d’affermage à la SERM, (Société d’Exploitation des Remontées Mécaniques de Morillon) dont Ivan Bettex en devient le Directeur Général. Cette nouvelle société filiale de Méribel Alpina, est représentée par son PDG André Surelle, qui apporte son expérience de promoteur immobilier et exploitant du domaine skiable de Méribel.

Annie Bettex, Maire-adjoint de François Delacoste lui succède en 1983. Sa première tâche est de soutenir le dossier de Morillon, devant le comité des UTN au Ministère à Paris. Un avis favorable est rendu permettant de créer la ZAC des Esserts en 1985 dont l’aménageur est la SACMO dirigée par André Surelle avec comme associée la Société de la Croix des Sept Frères ; puis la ZAC des Grands Champs en 1989, dont l’aménageur est Maurice Giraud. Cela apporte à Morillon les lits et commerces nécessaires à la pérennité de la station de sports d’hiver, « Preuve que les villages de montagne peuvent devenir autre chose que des usines à touriste ou des sanctuaires » selon Paul Quilès suite à sa visite à Morillon le 2 août 1985 (3).

Dans ce dynamisme, la commune construit en 1985 la télécabine de Morillon exploitée par la SERM. La CCAS en est un partenaire financier, puisqu’en contrepartie de son implantation à Morillon, la commune lui demande de participer à hauteur de 500 000 Fr. pour le financement de l’appareil comme la SACMO. Dans la continuité, le parc des remontées mécaniques se modernise avec l’implantation du Télésiège du Sairon en 1987, et du télésiège de la Lanche en 1989. Morillon dispose alors d’une porte d’entrée directe sur l’ensemble des stations du Grand Massif.

Tout cela impose à la commune la création de son propre Office de Tourisme, qui jusque-là dépend de l’Office de Tourisme de Samoëns sauf de 1968 à 1974, où une section pour Verchaix-Morillon a vue le jour. L’Office de Tourisme de Morillon est créé en 1987 par la commune avec pour première présidente Annie Bettex.

Afin de promouvoir davantage l’identité du Grand Massif, un Groupement d’Intérêts Economiques (GIE) est mis en place en 1988 avec les divers exploitants des remontées mécaniques ( la SEPAD pour Flaine, la SOREMAC pour les Carroz, la SERM pour Morillon, les régies communales pour Samoëns et Sixt), les cinq Offices de Tourisme et le Syndicat mixte de Flaine. Ce GIE sera remplacé par les associations Grand Massif Promotion puis aujourd’hui Grand Massif Evolution. Pour apporter plus d’intégration dans l’entité du Grand Massif , la SERM de Morillon est vendue en 1991 au groupe SEPAD de Flaine qui exploite déjà Samoëns et Sixt. Cet ensemble redevient en 1998, une filiale de Meribel Alpina avant de devenir filiale de la Compagnie des Alpes.

Le village ne s’endort pas, la commune met en chantier en 1990, la base de loisirs du Lac Bleu au bord du Giffre ouvert à la baignade. Ce lac est aujourd’hui la pièce maitresse du tourisme d’été pour Morillon, pouvant être également utilisé en hiver pour les sports nordiques.

En 1994, Annie Bettex avant de se retirer de sa fonction de maire, lance avec son conseil municipal la transformation d’un chalet d’alpage en halte-garderie ainsi que les premières études de neige de culture sur le domaine de Morillon. Ce dossier sera repris en 1995 par son successeur Alain Dénériaz, qui avec son conseil réalisera la retenue collinaire permettant la réalisation du réseau de neige de culture. A cette occasion, un nouveau contrat de concession est passé avec l’exploitant des remontées mécaniques pour la réalisation de deux télésièges entre Les Esserts et la Vieille.

Par ce développement tout au long des années, Morillon est devenu une station touristique reconnu, créant de nombreux emplois pour les villageois, mais aussi de grandes carrières sportives grâce au Ski-Club de Morillon, avec notamment Antoine Dénériaz champion olympique de descente, , Philippe Verneret, plusieurs fois champion de France de ski, François Dénarié champion du monde de slalom citadin et champion de France universitaire, Joël Renand, champion de France junior de descente, Sarah Bonfanti championne de France du kilomètre lancé, Simon Piolaine 8ème des mondiaux juniors en ski alpin.
En 2021, Morillon compte parmi ses sportifs de haut-niveau en activité Argeline Tan-Bouquet, championne du monde de télémarque en sprint parallèle et 4 fois vice-championne du monde en classique. Tous ces résultats encouragent les jeunes Morillonnais à découvrir le plaisir de la glisse sur le domaine de Morillon Grand Massif, soutenus par le dispositif du « Ski pour Tous » mis en place sous la mandature du maire Alain Cella.

Cette histoire qui continue n’aurait pas été possible sans le soutien des hommes et des femmes qui ont contribué directement ou indirectement au développement de notre village dont notamment l’ensemble des propriétaires fonciers qui ont accepté plus ou moins facilement les infrastructures d’une station touristique comme Morillon.

(1). in « Voyages en Zigzag », lors du voyage à Chamonix en juin 1828.
(2). Cf. « 40 ans de ski à Morillon », publié en 1998
(3). « La politique n’est pas ce que vous croyez » de Paul QUILÈS, édition Robert LAFFONT en 1985.